Les mécanismes du stress professionnel en entreprise

stress professionnel

Je vois encore passer ici ou là des articles vendant un « bon stress » et un « mauvais stress » ceci à mon sens perpétuent des informations erronées qui sont en plus nuisibles pour le développement de nos entreprises à l’heure ou l’on parle de QVT et de RPS. Je vous propose un petit voyage à l’ère des neurosciences cognitives pour reconsidérer le stress professionnel et le prendre pour ce qu’il est vraiment.

Qu’est-ce que le stress ?

Si l’on regarde chez les animaux le stress est un réponse de défense à un danger. Celui ci est comme un signal d’alarme qui permet de mettre en route des mécanismes biologiques pour permettre la survie. Le professeur J.Fradin (INC/IME) défini le stress chez l’Homme comme une réponse instinctive, principalement gérée par une partie archaïque de notre cerveau, le cerveau reptilien.

Henri Laborit a montré que le stress instinctif se caractérise par trois comportements types pour répondre au danger :

  • La fuite, devant un danger nous allons tenter de fuir ou de nous cacher pour échapper à celui-ci. Elle se caractérise en terme d’émotions par de la peur, de l’anxiété, de l’angoisse et se manifeste physiquement par de la gène, de la confusion, des vertiges, des palpitations, de l’agitation dans les jambes, un regard fuyant…
  • La lutte, en deuxième instance si la fuite s’avère impossible nous allons faire face au danger faire, chercher à intimider qui a aller jusqu’au combat. Elle se caractérise en terme d’émotions par de la tension, de la colère, de l’agacement et de l’agressivité et se manifeste physiquement par de l’impatience, de l’irritabilité, des tensions musculaire dans le haut du corps, regard fixe…
  • L’inhibition, en dernier lieu et en cas d’échec de la phase précédente, nous allons essayer de faire le mort pour que l’agresseur nous oublie. Elle se caractérise en terme d’émotions par du découragement, de l’apathie, de la tristesse et se manifeste physiquement par de la fatigue, de la lassitude, des pleurs, de la résignation, regard bas…

Par défaut devant un danger nouveau, ces trois stratégies seront essayées dans cet ordre. Par la suite, notre apprentissage nous permettra éventuellement de sauter des étapes en fonction de la connaissance que nous avons des situations.

En définitive J. Fradin nous indique que :

le stress est au mental ce que la douleur est au physique : un indicateur de dysfonctionnement.

Pour ne finir avec cette appellation de « bon stress », celui-ci ne peut pas être bon dans le sens où il engendre tout un tas de modifications physiologiques pour faire face à l’instant mais qui sont néfastes sur la santé au long terme : Augmentation de la tension artérielle et production d’adrénaline et de cortisol pour s’insensibiliser en lutte ou en fuite, diminution de la réponse immunitaire non nécessaire et consommatrice d’énergie, baisse de production des neurotransmetteurs en phase d’inhibition…
Des liens entre un grand nombre de pathologies modernes et stress ont été prouvés par de nombreuses études épidémiologiques.
Sur le court terme, en stress, tout les processus consommateurs d’énergie sont suspendus, la créativité, l’inspiration, l’esprit de synthèse … sont les premiers à être touchés.

N’en doutons pas une seconde, le stress professionnel est bien l’ennemi public n°1 de la santé et de l’intelligence.

Stress professionnel et vie en entreprise

Dans notre vie professionnelle nous ne sommes pas tous les jours en danger de mort et pourtant nous vivons au quotidien des situations ou nous ressentons ces sentiments et vivons les manifestations du stress professionnel. Dans notre cerveau tout se passe comme si nos contrariétés, nos ennuis étaient assimilées à des dangers réels. Nous ne sommes pas poursuivi par un lion mais devons juste, par exemple, répondre à cet appel d’offre d’enjeu capital avant lundi. Ce stress n’est pas lié à un instinct de survie réel mais plutôt d’origine interne et liés à nos modes de pensés, la notion d’enjeux, la façon dont on envisage la tache, sa difficulté…

Nous n’avons pas tous les mêmes façon de stresser et nous ne stressons pas tous pour les mêmes raisons. Ainsi une situation maitrisée pour certains est source de stress pour d’autres. Le stress est donc une réponse individuelle qui pourrait se schématiser de la manière suivante :

Réponse individuelle du Stress = Agent Stresseur × Stressabilité

Notre réponse individuelle au stress dépend bien de la présence de facteurs et de situations externes potentiellement stressantes (stresseur) mais aussi de notre capacité a être stressé par celles-ci (stressabilité).

Pour diminuer notre stress professionnel nous pouvons donc agir de deux manières :

  • En faisant diminuer le nombre ou la fréquence des agents stresseurs

ou

  • En travaillant pour faire diminuer notre stressabilité.

Stress professionnel et cerveau

De plus en plus d’études tendent à démontrer la cohabitation de plusieurs centres de gouvernance dans notre cerveau. Il n’y aurait pas une pensée unique et dirigée mais plusieurs réseaux de réflexions parallèles qui cohabitent pour fournir la réponse la plus adaptée à la situation (Daniel Kahneman – système 1 système 2, Jacques Fradin – l’intelligence du stress).
Notre cerveau possèderait, entre autres, un mode automatique hébergé dans les territoires limbiques et reptilien, simple mais robuste pour gérer le quotidien et un mode adaptatif doué pour la réflexion et la gestion du complexe principalement situé dans les aires préfrontales (en avant du cerveau).

Selon les expériences de Skinner, notre cerveau automatique apprend de ses expériences heureuses ou malheureuses et se constitue une bibliothèque de comportement et de stratégies basées, de manière subjective, sur ses apprentissages :

  • Telle expérience a été un succès, si elle se reproduit je sais que je pourrai faire face.
  • Telle expérience a été douloureuse, j’appréhende que cette situation se reproduise et privilégie une autre réponse.

Nous avons principalement deux modes de fonctionnement :

  • De manière générale, quand une situation simple ou connue est détectée, notre mode automatique prend la main et se branche sur la réponse qui lui semble la plus appropriée en fonction de son apprentissage.
  • Quand une situation est inconnue ou complexe, normalement, notre cerveau adaptatif prend le relai, car il est le spécialiste de la complexité et le mieux à mème de trouver les attitudes et créer des stratégies plus adaptées.

Il peut arriver que notre cerveau adaptatif se fasse voler la vedette par le mode automatique lors du traitement de situation complexes ou inconnues. D’après les observation du Dr J.Fradin, notre cerveau adaptatif assisterait impuissant à cette erreur de recrutement. Conscient de cette erreur, il ne pourrait que signaler l’anomalie en s’adressant directement à notre cerveau instinctif qui ne connait que trois messages d’alerte la fuite/la lutte/l’inhibition.

C’est ainsi que se produirait le stress d’origine cognitif, le stress est donc une manifestation qui nous indique que nous ne recrutons pas notre bon cerveau pour traiter la situation à laquelle nous sommes confronté. Pour nous permettre de redevenir serein, il faut pouvoir redonner la main à la bonne partie du cerveau, c’est à dire basculer dans notre gouvernance adaptative.

erreur et bascule stress

Schéma de l’erreur de recrutement, de ses conséquences et de la bascule nécessaire pour en sortir. Modèle INC

 

Nous avons tous en mémoire, des exemples de ce type de situations, comme ce matin où nous cherchons désespérément ce dossier urgent dans tous les recoins habituels du bureau. Cela fait même 3 fois que nous retournons le tiroir du haut en espérant qu’il surgisse à la troisième tentative. Plus le temps passe et plus nous sommes stressés et nous commençons même à accuser tout les malheureux présents ce jour là d’avoir déplacer le maudit dossier. Devant l’absurde de la situation et de guerre lasse nous finirons par décolérer et nous nous autoriserons alors peut être à envisager la situation sous un autre angle. Finalement nous nous rappellerons que la veille nous étions passé par la compta et que le fameux dossier, est comme par hasard sur le coin du bureau.

Stress professionnel et management

D’un point de vue management ce que nous pouvons en déduire en premier lieu, c’est que mettre en stress ou la pression sur ses collaborateurs est très contreproductif. Ils perdent beaucoup de leurs capacités. Il est malheureusement facile de confondre une apparente effervescence ou l’agitation avec de l’efficacité ou de la productivité.

Je vous invite à consulter le dossier sur le manager toxique pour comprendre ce qu’il faut faire et ne pas faire.

De fait, le manager se doit de faire baisser le nombre de stresseurs potentiels et se mettre au service de ses équipes pour leur faciliter la tache.

Le rôle secondaire du manager concernant le stress professionnel concerne son devoir d’alerte et de détection, il peut et doit se former aux méthodes pour détecter le stress chez ses collaborateurs. Il peut aussi travailler son empathie pour être plus à même de repérer les difficultés de ses collaborateurs. Enfin, il peut se former aussi aux outils de facilitation préfrontales pour permettre à ses collaborateurs comme à lui même de basculer plus facilement en mode adaptatif.

Enfin, d’un point de vue du système que représente l’entreprise, des efforts peuvent être fait pour envisager le stress de manière globale ou structurelle et ainsi faciliter la montée en autonomie des collaborateurs pour leur permettre de faire face aux situations de plus en plus complexes auxquelles les salariés sont confrontées.

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Je vous invite à consulter à ce sujet le dossier sur les entreprises agiles.

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