Syndrome de l’imposteur en entreprise, interview de Kevin Chassangre psychologue

syndrome de l'imposteur en entreprise

Kévin Chassangre est psychologue, doctorant en psychopathologie à l’université de Toulouse et co-auteur avec Stacey Callahandu du livre « Traiter la dépréciation de soi : Le syndrome de l’imposteur », il nous parle du syndrome de l’imposteur en entreprise et nous allons voir avec lui, comment le repérer, quelles en sont les origines et comment s’en prémunir.

De manière générale, j’ai pu constaté l’importance de ce syndrome et ses effets néfastes lors de mes accompagnements auprès de managers, de dirigeants et d’ équipes dans les entreprises que j’accompagne ou auprès des particuliers que j’accompagne.

Définition du syndrome de l’imposteur

Ce syndrome concernerait une très large partie de la population puisque près de 60% à 70% des personnes au cours de leur vie pourraient en subir ses effets.  Il n’est bien sûr pas réservé au monde professionnel mais dans la mesure ou ce contexte oblige à l’exposition, il serait un terreau favorable.

Pourquoi parle-t-on de syndrome de l’imposteur ?

Ce syndrome n’est pas une pathologie, bien qu’il puisse amener parfois une forte détresse psychologique, mais plus un obstacle à son véritable potentiel professionnel ou une barrière au bien être. Du moment où une personne ne se sent pas légitime dans son statut actuel et a des difficultés à s’approprier son succès, on peut parler du syndrome de l’imposteur.

Comment se manifeste le syndrome de l’imposteur ?

Un schéma comportemental spécifique en 5 étapes :

De manière générale, il se manifeste sous la forme d’un cercle vicieux lors de la réalisation de taches quotidiennes ou nouvelles.

Etape 1 :

Le démarrage de la tache est associé à un vécu de forte anxiété. 

Etape 2 :

Il y a deux types de méthodes de travail associées :

  • Procrastination/évitement pour repousser l’anxiété et la peur d’échouer
  • Travail frénétique/perfectionnisme pour être sûr de garantir sa légitimité

Etape 3 :

Le niveau d’exigence interne conduit généralement à une réussite mais avec un soulagement modéré ou à un échec qui sera vu comme dramatique.

Etape 4 :

L’analyse de la situation qui suit conduit à une mauvaise attribution des causes de succès ou d’échec.

En cas de réussite, les causes du succès seront attribuées à la chance en cas de procrastination, ou au fait d’avoir fourni un effort démesuré en cas de préparation frénétique, c’est à dire à des causes externes.

En cas d’échecs, les causes seront attribuées en interne comme preuve de la non valeur de soi et la culpabilité sera renforcée ainsi que l’image négative, « c’est ma faute je suis nul(le) « .

Etape 5 :

Dans le deux cas, la personne aura l’impression de ne pas être à la hauteur, la boucle est bouclé et la prochaine tache sera envisagée avec encore une faible estime de soi.

Quel sont les moteurs de ce type de comportement ?

Un modèle comportementale basé sur l’ambivalence : 

D’un coté, le moteur principal est la peur de l’échec avec en tache de fond le fait qu’échouer fait courir le risque d’être démasqué et de perdre la face dans son entreprise, de se sentir complètement nul ou un imposteur ; on retrouve alors des comportement de protection avec peu de prise de risque, ou de compensation avec un travail frénétique.

De l’autre, la peur et la culpabilité de réussir, car la réussite risque d’amener de nouvelles exigences qui vont faire monter les enjeux ou le fait que cette réussite va amener de la jalousie avec la peur d’être rejeté au final.

Quels sont  les traits communs des personnes qui souffrent de ce syndrome ?

On va retrouver de manière commune le besoin d’être remarquable qui se caractérise par une grande tendance au perfectionnisme, peu de demandes d’aides ou de coopération pour être sûr de prouver sa légitimité de manière individuelle, une volonté d’être au dessus des autres qui peut passer pour du mépris. De manière générale, les personnes qui ont un SI (syndrome de l’imposteur) sont très engagées et très motivées ! Ce besoin peut se généraliser dans les différents domaines de vies amenant ces personnes à jouer les Superman/woman.

Comment ces personnes se comportent-elles dans la relation au autres ?

Elles ont pour habitude de dénigrer leurs compétences, elles refusent en général les feedback positifs en attribuant leur situation à des facteurs externes en négligeant leurs propres valeur en banalisant ou normalisant leur réussite. De plus persuadées qu’elles n’ont pas fait le job, elles vont confirmer cela dans la tête des autres en n’exigeant pas la réciprocité de leur bon services rendus, ce qui va contribuer à faire monter le niveau d’exigence de leurs relations. Il s’agit là aussi d’un boucle négative dans la perception qu’elles donnent d’eux même aux autres. Cela se caractérise aussi par une faible capacité à dire NON et une tendance à faire passer leur besoins après celui des autres. Au final, les personnes qui ont SI pourront exploser devant  la surcharge de travail et passer pour des personnes ingérables.

Quels sont les risques encourus ?

Les risques individuels sont liés au problématique d’une faible confiance en ses compétences ou d’une faible estime de soi, on y retrouve des processus d’auto-sabotage, de haut niveaux d’anxiété pouvant évoluer en crise panique, des dépressions ou des accès de colères et des burnout. Les risques collectifs sont associés aux problématiques organisationnelles ou des effets d’entrainement dans des spirales négatives du type sauveur/victime/bourreau ou des processus de boucs émissaires dont les personnes ayant une faible estime d’eux même sont les cibles privilégiées.

Quels sont les facteurs qui contribuent à l’émergence du syndrome de l’imposteur ? 

De nombreux facteurs peuvent amener l’expression du SI, tant au niveau de l’estime de soi, de la confiance en soi  que de l’environnement.
Du moment où l’on a des difficultés à s’attribuer les mérites de notre succès, nous pouvons rapidement aller au SI mais des contextes particuliers peuvent aussi favoriser sa survenu :

  • Un environnement de compétition excessif
  • Une concurrence accrue dans son domaine d’activité
  • Un manque de collaboration ou de coopération dans les équipes
  • De fortes pressions de réussites professionnelles orientées résultat
  • Des succès inattendus ; de nouvelles situations, de nouveaux rôles ou statuts
  • Des étapes d’évaluations régulières, notes, mises en situations d’évaluation devant des groupes  
  • Un sentiment d’isolement dans son domaine, un manque de soutien perçu  
  • Une orientation sur la production, la performance plutôt que sur le l’apprentissage 
  • Une tendance à dénigrer et diminuer les réussites ou des compliments exagérés faisant monter le niveau d’exigence et d’attente

L’entreprise à tout intérêt à prendre soin de ces personnes pour éviter de contribuer aux effets néfastes du SI poussé à l’extrême sur le plan de la santé et du bien être comme sur le plan de la productivité et de l’efficacité de ses équipes.

Quels conseils pouvez-vous donner pour s’en prémunir individuellement et collectivement ?

La première étape pour s’en prémunir, est de savoir que ce syndrome existe et d’en comprendre les manifestations.

De manière individuelle, il est important de bien s’approprier ses différentes réussites, de pouvoir s’y arrêter et de se récompenser ou s’octroyer des moments de plaisir pour éviter la suractivité inhérente au SI.
L’auto-observation est la 
clé : mes comportements, sont-ils en liens avec de manifestations du SI ?
Favoriser l’authenticité, exprimer son ressenti. Et surtout, s’accepter de manière inconditionnelle, c’est à dire quel que soit sa performance ou l’approbation des autres, tout être humain est faillible et peut être rejeté, cela n’en fait pas un imposteur pour autant.

De manière collective, veiller à ne pas mettre en place les conditions de l’émergence du SI chez les autres (cf paragraphe précédent), favoriser un climat d’encouragement sincère et de reconnaissance de l’apprentissage et du progrès de chacun, éviter les évaluations sur la performance pure, dédramatiser l’erreur et l’échec, bannir la culpabilité comme moyen de motivation.

En quoi le coach peut il aider ?

La première étape étant la prise de conscience, le coach grâce à son regard extérieur et son rôle de miroir peut apporter des points d’éclairages qui seront à même de faciliter  le diagnostic en individuel ou en collectif notamment au travers des signaux d’alertes comportementaux du groupe.
Par la suite, grâce à une bonne connaissance des mécanismes d’attributions de ce qui fait la confiance ou l’estime de soi, il peut permettre d’objectiver le processus négatif et contribuer à inverser sa tendance. Mise en perspective, déplacement de contexte ou de sens sont des moyens qui peuvent être utilisés pour faire évoluer les modes de pensés cognitifs et les réorienter vers quelques chose de positif.
Le travail sur les émotions et le ressenti que permet la relation de coaching est aussi un atout pour permettre la montée en autonomie du coaché dans la connaissance de ses propres mécanismes de fonctionnement interne.
Le coach peut aussi en travaillant sur le stress des situations perçues amener une atténuation des conséquences envisagées et une relativisation des exigences que le coaché se fixe.

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